Vélo & Territoires publie Les chiffres clés du tourisme à vélo 2021. Ces données choisies proposent une vision synthétique des indicateurs 202& relatifs à la fréquentation, à la réalisation du Schéma national des véloroutes, à la plateforme France Vélo Tourisme, et au développement de l’offre Accueil Vélo. Cette fiche a été établie en lien avec France Vélo Tourisme et ADN Tourisme. Elle a été présenté lors des RDV du Tourisme à vélo qui ont eu lieu les 23 et 24 juin 2022 à Orléans.
Atteindre la première marche des destinations vélo : challenge accepté !
Quelques mois après l’annonce par le Premier ministre du plan de reconquête du tourisme « Destination France », plus de 200 acteurs institutionnels et socioprofessionnels du tourisme à vélo se sont donné rendez-vous à Orléans les 23 et 24 juin dernier pour définir les contours de l’avenir du tourisme à vélo en France. Dans le berceau de La Loire à Vélo, itinéraire pionnier devenu phare, l’ambition de ces deux journées était grande puisqu’elle consistait à répondre à la question suivante : comment hisser la France au 1er rang des destinations mondiales du tourisme à vélo ? Pour atteindre l’objectif et, ce faisant, miser sur un tourisme plus durable et soutenable, il faudra « jouer collectif » et se donner les moyens de lever quelques freins. La marche est haute, mais le potentiel est réel, à condition d’activer les bons leviers.
Bien identifier les freins, pour mieux les dépasser
La table ronde organisée dans la matinée du 23 juin a posé le décor et permis d’identifier les freins à partir desquels fixer des objectifs pour accompagner un développement ambitieux du tourisme à vélo dans l’hexagone. Car si la France a des atouts et si le tourisme à vélo coche les case des nouvelles formes de tourisme (durable, de proximité, décarboné), elle va devoir lever quelques points de blocage pour aller plus loin et s’attaquer aux problèmes de fond, parmi lesquels : doter l’ensemble du territoire d’un maillage cyclable cohérent et équilibré ; développer des infrastructures de qualité sur la durée ; proposer une offre d’équipements et de services plus étoffée et structurée ; offrir une information lisible et accessible et la promesse d’une immersion par le vélo ; disposer d’une connaissance fine des clientèles et des retombées économiques ; travailler sur l’intermodalité. Sans surprise, ce dernier sujet s’impose comme une condition essentielle au déploiement du tourisme à vélo. En train, en bus mais aussi en bateau, les cyclotouristes doivent pouvoir plus aisément voyager avec leur vélo et s’informer.
« Le vélo est un formidable moyen pour faire vivre une expérience, permettre une immersion dans les territoires, il offre un retour sur investissement sans pareil ». François Bonneau, président du Conseil régional Centre – Val de Loire
Le développement de services adaptés aux touristes à vélo sera également déterminant pour l’avenir de la pratique. Aujourd’hui, force est de constater que l’offre est déficitaire ou inégalement répartie le long des parcours en itinérance. Les hébergements adaptés peinent à se développer, les solutions de stationnements vélo accessibles et sécurisés restent insuffisantes et les consignes à bagages encore trop peu nombreuses au sein des sites touristiques… Les aménités pensées pour les cyclotouristes doivent encore s’étoffer afin de mieux répondre à leurs multiples attentes. L’offre devra aussi gagner en visibilité, en musclant le marketing et la promotion. La Loire à Vélo en est le parfait exemple : « Il faut les services, les hébergements, les boucles pour aller découvrir les patrimoines locaux, mais aussi une marque booster [..] Le vélo est un formidable moyen pour faire vivre une expérience, permettre une immersion dans les territoires, il offre un retour sur investissement sans pareil », explique François Bonneau, président du Conseil régional Centre – Val de Loire. Le tourisme à vélo constitue en effet un vrai levier de développement économique pour l’ensemble des territoires, y compris les plus reculés, à condition de structurer davantage ce « chevelu de voiries » qu’est le réseau français, de l’expression du consultant en mobilités Julien de Labaca. Dans le contexte de structuration d’une filière économique du vélo en France, il faudra donc compter sur le tourisme.
Pourquoi les Allemands sont-ils n°1 ?
Après un regard auto-critique de la situation française, Frank Hofmann de l’Allgemeiner Deutscher Fahrad-Club (ADFC, l’association allemande de référence du vélo) a présenté un état des lieux du tourisme à vélo en Allemagne et a porté un regard aiguisé sur l’offre française. Alors, qu’est-ce qui différencie l’Allemagne de la France ? Pourquoi nos voisins sont-ils aujourd’hui leader en matière de tourisme à vélo ?
« la concurrence entre les destinations est saine, elle fera progresser chaque pays ». Frank Hofmann, Allgemeiner Deutscher Fahrad-Club.
Le pays peut tout d’abord compter sur une organisation nationale différenciante : fort de ses 50 ans d’ancienneté, l’ADFC est composé d’une cinquantaine de salariés répartis sur l’ensemble du territoire et offrant leurs services à plus de 250 000 adhérents. Elle constitue une vraie force de frappe pour mettre en œuvre la politique cyclable du pays.
Avec plus de 265 grands itinéraires contre seulement 58 en France, l’offre cyclable allemande est beaucoup plus développée que la Française. Ce différentiel d’environ 50 000 km s’explique par un positionnement historique et une stratégie bien ficelée de l’autre côté du Rhin. Enfin, au-delà des chiffres qui feraient rougir n’importe quelle destination, l’Allemagne offre quelques particularismes : une culture du tourisme à vélo de longue date, un niveau d’exigence élevé autant côté des infrastructures que des services, une approche par produit touristique pour chaque itinéraire disposant de son propre business model, une connaissance fine du public cible permettant d’offrir des outils adaptés. Par exemple, un grand soin est apporté aux informations disponibles sur les itinéraires : « il faut offrir aux touristes à vélo une pluralité des moyens d’informations. Les outils embarqués ne vont pas tout résoudre, la signalétique et le jalonnement sont essentiels », décrit Frank Hofmann. Sur cette thématique comme sur d’autres points, le grand témoin invite à créer l’émulation : « la concurrence entre les destinations est saine, elle fera progresser chaque pays ». Le défi à relever est de taille. L’objectif peut être atteint si l’ensemble des acteurs se saisit des potentialités de la destination France à vélo et s’attaque en profondeur aux freins identifiés.
Premières pistes pour développer le tourisme à vélo en France
Le constat sur les atouts du territoire est unanime : la France a tout pour devenir la destination phare du tourisme à vélo ! En plus d’un vaste littoral et d’une grande diversité de paysages, la « destination France » bénéficie également de facilités d’accès avec un large potentiel d’infrastructures existantes et plus de 400 gares. La multitude d’acteurs prêts à s’investir dans le secteur est également un atout qui ne doit pas être négligé. « La France a une diversité de paysages plus large que l’Allemagne, nous avons donc un potentiel plus important » indique Lionel Habasque, président de France Vélo Tourisme.
Alors comment s’y prendre ? « Le but est de rendre le voyage à vélo facile et accessible. On ne s’adresse plus uniquement à une clientèle d’aventurier mais également à des néophytes qui recherchent un voyage expérientiel grâce au vélo » explique Pierre Lambin, directeur général de l’agence réceptive Cheverny Voyages. Pour proposer un service clé en main, fluidifier et simplifier le parcours client et laisser la part belle au plaisir et à la découverte, sans effort ou presque, une implication collective de tous les acteurs, des institutionnels aux socioprofessionnels, doit s’opérer à l’échelle des destinations. Flâner au bord d’un lac, visiter des châteaux, déguster les spécialités du terroir… les plaisirs recherchés traduisent le besoin d’authenticité auquel doivent répondre les territoires.
« La France a une diversité de paysages plus large que l’Allemagne, nous avons donc un potentiel plus important ». Lionel Habasque, président de France Vélo Tourisme.
Les itinéraires relativement bien développés aujourd’hui pourraient également inviter les cyclotouristes à réaliser au cours de leur voyage à vélo quelques « city-break », à le réinventer lors d’échappées vertes, ou à vivre une expérience mixte bateau-vélo au fil de l’eau. L’hybridation des pratiques, mais également des services et des équipements, s’impose en effet plus que jamais. Les différents profils des touristes à vélo sont aussi à prendre en compte dans le développement de l’offre et de la communication. Des études de clientèles doivent être conduites afin d’accroitre la connaissance des différentes cibles et adapter au mieux les actions à mener. La stratégie de communication passe aussi par l’attribution de labels et de certifications reconnus au niveau national et européen.
« Nous notons une prise de conscience de plus en plus forte de la nécessité de changer notre pratique du tourisme ». Aude Andrup, coordinatrice nationale tourisme de l’Ademe.
Un gage de confiance pour les touristes à vélo qui aspirent désormais à vivre leur voyage et non plus à le consommer. « Nous notons une prise de conscience de plus en plus forte de la nécessité de changer notre pratique du tourisme », relève Aude Andrup, coordinatrice nationale tourisme de l’Ademe. Ce constat plaide pour une réinvention du tourisme dans un contexte climatique, sanitaire, environnemental et politique en profonde mutation. Alors que e tourisme est source de 11% des émissions de gaz à effet de serre en France, principalement liés aux transports, le déploiement du tourisme à vélo s’impose alors comme un incontournable. Une étude menée par l’Ademe révèle en effet que 100 % de part modale de vélo pendant le séjour réduirait de 60 % les émission de CO2 à horizon 2030. Et cerise sur le gâteau : la petite reine est le seul mode de transport, avec la marche, qui offre des externalités positives grâce notamment à ses bienfaits sur la santé ! Un changement de cap dont les acteurs du tourisme pourront se saisir grâce aux multiples opportunités mises en lumière pendant la conférence.
De belles actions en perspectives certes, mais génératrices de coûts et nécessitant d’importants moyens humains et financiers. Sur ce plan, bonne nouvelle : au-delà du large retour sur investissement évoqué par les différents intervenants, l’Ademe dévoilera fin 2022 les modalités d’une aide financière de 6 millions d’euros sur la période 2023/2024 pour accompagner les projets de déploiement d’Accueil Vélo, des aires de services et la poursuite du Schéma national des véloroutes.
Changement de braquet en perspective pour le tourisme à vélo en France. En selle vers 2030 !
Elodie Sauze
Pour aller plus loin
Les chiffres clés du tourisme à vélo
le communiqué de presse post-événement
Présentation des plénières du jeudi
Présentation Atelier 1 : Qualité des itinéraires, quelles garanties pour les touristes à vélo ?