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Améliorer l’expérience des cyclistes à l’aide d’équipements adaptés

Extrait de Vélo & Territoires, la revue n°53

Des équipements de première nécessité aux aires de repos complètes, la demande d’équipements connexes aux itinéraires cyclables est forte. Les études de fréquentation et de retombées économiques réalisées à ce jour confirment que des efforts restent à fournir pour proposer des services de qualité sur les grands itinéraires cyclables français. Mais pour développer des infrastructures cyclables adaptées au plus grand nombre, que faut-il équiper et pour quel usage ? Dans une fiche-action « équipements et aires d’arrêt » et lors d’un atelier à ses 22es Rencontres, Vélo & Territoires s’est penché sur cette question.

Des progrès à faire

« Il faut que les cyclistes vivent une aventure » témoigne François Leruth de son expérience d’infrastructures cyclables sur le RAVeL et les véloroutes en Wallonie. Du point d’information à la borne de réparation, de la station de gonflage à la protection contre les intempéries et le vol, l’offre d’équipements publics le long d’un itinéraire cyclable complète l’aménagement et la signalisation directionnelle. Souvent concentrés au sein d’un même espace, nommé « aire d’arrêt », ces équipements font vivre l’infrastructure de l’itinéraire cyclable. Mais le constat est clair : les grands itinéraires cyclables français doivent progresser pour développer et harmoniser leurs équipements connexes. Si l’étude de fréquentation de la ViaRhôna de 2017 révèle une hausse homogène et constante de la fréquentation, elle identifie également des carences. Une large part des cyclistes interrogés se déclarent en effet insatisfaits des services proposés. En tête des mécontentements ? Le manque de réparateurs vélo et d’accès Wifi. L’absence de toilettes, de points d’eau et de stationnements vélos sécurisés est également pointée du doigt. « Qu’ils soient néophytes ou expérimentés, des familles à vélo ou des cyclosportifs, les cyclistes ont besoin d’aires de repos complètes, adaptées aux différents types de vélo » explique Pierre Toulouse de la Coordination interministérielle du développement de la marche et de l’usage du vélo. Et côté hébergement ? « Il est prioritaire de proposer une offre à la hauteur des besoins des cyclistes. Aujourd’hui, la plupart des campings français ne sont pas adaptés à l’itinérance à vélo » souligne Nicolas Mercat, consultant expert chez Inddigo. « Les itinérants ne souhaitent pas des parcelles vides. Ils attendent des espaces avec un minimum d’aménagement, des tables, des zones abritées et conviviales pour dîner et rencontrer d’autres voyageurs, ainsi qu’un stationnement vélo. La France reste encore à la traîne par rapport à ses voisins européens quant à ce type d’équipement ». Si l’achèvement des itinéraires est indispensable pour assurer un maillage cyclable continu, les équipements fonctionnels, harmonisés et répartis de façon homogène doivent également figurer au rang de priorités pour les territoires désireux de proposer des itinéraires de qualité.

Connaître, s’approprier et utiliser le territoire

Satisfaire les besoins des cyclistes – information, repos, ravitaillement, réparation, restauration, hébergement –, telle est la vocation des équipements connexes. S’ajoute à cela l’expérience proposée et la valorisation des territoires traversés. La Wallonie a entrepris un important travail qualitatif pour que les usagers locaux et les touristes à vélo s’approprient les itinéraires du RAVeL et la Vennbahn. « Œuvres d’art, arboretums, aires d’interprétation du paysage agrémentent les aménagements cyclables pour les faire vivre et raconter l’histoire du territoire » illustre François Leruth. « Sur la Vennbahn, du bois local et de vieilles caisses de bière sont par exemple utilisés pour l’aménagement des aires de repos afin de valoriser le patrimoine naturel et paysager du territoire ». Les centres-bourgs et coeurs de villages doivent profiter du dynamisme des itinéraires cyclables. Ils sont à privilégier pour l’implantation d’aires d’arrêt. Dans le cadre de ses études de 2014 et 2017 sur les équipements publics, l’association Vélo Loisir Provence a recensé l’existant et identifié les besoins de chaque commune du Luberon. « Grâce à ce repérage terrain réalisé en lien étroit avec les communes, nous avons constaté que de nombreux équipements sont déjà présents sur le territoire. En tout, 66 % des communes du Luberon sont déjà équipées d’aires de pique-nique par exemple » précise Camille Perretta de Vélo Loisir Provence. « L’une de nos recommandations principales est d’utiliser l’existant et non recréer des équipements le long des itinéraires cyclables. Une meilleure signalisation de ces équipements existants est effectivement nécessaire. » Même constat du côté de Laurent Savignac, chef de projet circulations douces de la région Centre-Val de Loire : « Souvent les équipements sont encore installés ex nihilo. Ils devraient pourtant trouver leur place dans les centres-bourgs. » Les politiques d’équipements émergent dans les territoires. Elles nécessitent d’être soutenues et généralisées par l’ensemble des collectivités pour proposer une offre vélo de qualité en France à la hauteur des itinéraires des pays voisins.

L’une de nos recommandations principales est d’utiliser l’existant

Une offre à harmoniser, à structurer et à améliorer

Si l’aménagement et la signalétique directionnelle sont un élément clé pour le bon développement d’un itinéraire cyclable, des réflexions sur les équipements connexes doivent également être engagées dès sa création. Ce travail est utile pour une répartition homogène d’équipements sur l’ensemble de l’itinéraire et offre une continuité d’aménagement. « Dans la Drôme, nous cherchons à développer des aires d’arrêt dès la création de nos itinéraires, là où l’emprise foncière est disponible. Nous essayons d’utiliser au maximum l’existant pour assurer des aires à intervalles réguliers » explique Christian-Bernard Carlac du département de la Drôme. « Nous laissons aux communes la responsabilité de créer des équipements plus conséquents, comme les sanitaires. » L’enjeu est alors de mobiliser et de sensibiliser les communes concernées afin qu’elles s’approprient les infrastructures cyclables et assurent notamment l’entretien. « Dans le Calvados, les aires d’arrêt sont aménagées en même temps que l’itinéraire. Le Département les prend à sa charge. Cela n’empêche pas les communes de les compléter. Les communes sont par ailleurs responsables de l’entretien de ces espaces. Cependant il n’est pas toujours facile de les impliquer à 100 % » admet Élie Daguet du département du Calvados. Le développement d’équipements connexes doit s’accompagner d’une concertation avec les acteurs locaux. Un défi que Vélo Loisir Provence a réussi à relever par son étude sur les équipements publics en Luberon. Pendant deux ans Vélo Loisir Provence a parcouru 500 km pour faire le diagnostic de l’existant, rencontrer les différents partenaires (départements, EPCI, communes, offices de tourisme, parcs naturels régionaux, usagers) et les fédérer autour de ce projet. De la concertation à la réalisation en passant par le recensement, la réflexion en termes de préconisations et la restitution, l’étude s’est scindée en cinq phases. Publication d’un guide d’aide au développement des équipements publics, fiches de préconisations pour chacune des communes du Luberon, charte homogène pour tout le territoire sont le fruit de ce travail en circuit. Aujourd’hui, une réflexion plus globale sur La Méditerranée à vélo – EuroVelo 8 est engagée à partir des conclusions de l’étude menée par Vélo Loisir Provence.

Le développement d’équipements connexes doit s’accompagner d’une concertation avec les acteurs locaux

Suite aux résultats de l’étude de fréquentation dévoilés début 2018, les partenaires de la ViaRhôna souhaitent développer et harmoniser des aires d’arrêt sur l’ensemble de l’itinéraire. « Les projets d’équipement se multiplient sur la ViaRhôna. Mais le constat est que nous manquons d’homogénéité dans cette offre aujourd’hui. Pour pallier ce problème nous envisageons de rédiger un guide de préconisations » témoigne Simon Larcade, chargé de mission à la région Auvergne-Rhône-Alpes et coordinateur de la ViaRhôna. Si la répartition homogène sur l’itinéraire est indispensable, « il serait souhaitable d’indiquer sur les stations à combien de kilomètres se trouve la prochaine aire d’arrêt » complète Gilbert Perrin, président de l’Association européenne des voies vertes qui rappelle que les itinéraires sont utilisés non seulement par des cyclistes français, mais aussi par des étrangers pour lesquels les panneaux sont souvent difficiles à déchiffrer aujourd’hui.

Classification d’aires d’arrêt

Selon la situation géographique, la fréquentation et les usages, une aire d’arrêt pourra être plus ou moins grande et plus ou moins fournie en équipements. Dans sa fiche-action, Vélo & Territoires distingue trois catégories : les aires d’arrêt principales, les aires d’arrêt secondaires et les haltes-repos.

Équiper pour différents usages

Les besoins en termes d’équipements varient selon le type d’espace et l’usager. « Des touristes à vélo aux cyclistes quotidiens, en passant par les cyclosportifs, en milieu urbain, périurbain ou rural, la qualité et l’adaptation des infrastructures cyclables sont essentielles pour satisfaire les attentes des différents usagers » commente Fabien Ripaud, responsable marketing et communication d’Altinnova. « Nous proposons des abris vélos solaires autoportants avec contrôles d’accès connectés pour les cyclistes quotidiens et les touristes à vélo en Bourgogne ; des stations de gonflage sur la ViaRhôna à Valence, Lyon ; l’équipement d’une conciergerie pour les touristes à vélo sur La Loire à Vélo et La Vélo Francette à Angers ; une halte cycliste sur La Scandibérique à Choisy-le-Roi… »

Ces équipements connexes contribuent à un meilleur confort, rassurent et attirent de nouveaux publics sur les itinéraires cyclables. « Les infrastructures cyclables adaptées à tous, ce sont des projets d’aménagement. Il faut donc penser l’espace, l’histoire que le territoire souhaite raconter » précise Benoit Fournier-Mottet de SuperVitus305 qui a accompagné Grenoble-Alpes Métropole pour le développement du réseau cyclable structurant Chronovélo. Pour atteindre l’objectif de 12 % de part modale vélo à l’horizon 2020, la métropole grenobloise entend sensibiliser des usagers potentiels qui n’osent pas encore se déplacer à vélo par peur ou par inexpérience. Le réseau Chronovélo se traduit par quatre axes cyclables bidirectionnels d’au moins trois mètres de large avec une identité visuelle spécifique par le biais d’un marquage au sol. But ? Assurer un confort accru et une sécurité renforcée pour le plus grand nombre d’usagers quotidiens à Grenoble. Les aménagements cyclables seront complétés par une cinquantaine d’aires de services qui offriront aux cyclistes un point de rencontre, un plan du quartier et du réseau Chronovélo, ainsi qu’une pompe à vélo et un banc. S’appuyant sur la même logique de structuration que celle des transports publics, les axes Chronovélo seront identifiables par un numéro et chacune des aires de services portera un nom pour être facilement repérable. Assurer des équipements ouverts à tous et en tout temps implique aussi l’accès des plus fragiles (personnes à mobilité réduite, personnes souffrant de cécité partielle ou totale, enfants). La priorité doit par ailleurs être donnée à des services en libre-accès autant que possible.

En plein essor, le vélo à assistance électrique (VAE) ouvre de nouveaux usages et séduit de nouveaux cyclistes, mais pose aussi de nouvelles questions pour les territoires. Faut-il équiper les aires de bornes de recharge pour VAE ? Quelle répartition privilégier ? « Pour éviter que les points de recharge deviennent rapidement obsolètes, il faut porter une attention particulière à leur bonne répartition le long des itinéraires » insiste Pierre Toulouse. Sachant par ailleurs que l’autonomie des batteries pour VAE ne cesse de s’améliorer. Et d’ajouter : « Aujourd’hui, les prestataires privés installent principalement les bornes de recharge, mais souvent ex nihilo. » Mieux vaut-il investir dans l’installation de prises de recharge rapides pour VAE ou orienter les usagers vers des restaurants, cafés, sites de visite déjà équipés ? Pour solutionner cette question devenue épineuse pour de nombreux territoires face au phénomène VAE, le dialogue entre acteurs publics et économiques semble indispensable pour proposer une offre vélo structurée, harmonisée, durable et adaptée à tous dans les territoires.

Dorothée Appercel

Vélo & Territoires, la revue