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Savoir Rouler à Vélo : 850 000 enfants seront formés chaque année en France

A égalité avec l’aisance aquatique, le vélo retrouve ses lettres de noblesse dans l’éducation des enfants. Le programme Savoir Rouler à Vélo (SRAV), mesure adoptée en janvier 2018 par le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) et reprise dans le Plan vélo national de la même année, inscrit le vélo comme un savoir fondamental à acquérir avant onze ans. L’objectif est ambitieux. A terme, ce sont 850 000 enfants qui devront être formés chaque année avec trois niveaux d’apprentissage à atteindre en dix heures de formation pour in fine, savoir circuler en situation réelle et gagner en autonomie. Les collectivités territoriales ont un rôle important à jouer pour permettre le déploiement à grande échelle du programme. Si elles disposent de stratégies d’actions adaptées à leur territoire, la clé de réussite réside dans la mobilisation d’un écosystème d’acteurs locaux variés. Passage en revue des enseignements du webinaire dédié au SRAV organisé par Vélo & Territoires avec le ministère chargé des Sports. 1-2-3… Vélo !

Un objectif ambitieux, une dynamique multi-partenariale

On a du pain sur la planche”. De cette formule énoncée par Virginie Jouve, chargée de mission au ministère des Sports, on retient d’abord qu’entre les 30 000 enfants qui disposent aujourd’hui de l’attestation SRAV et l’objectif des 850 000 enfants formés chaque année, l’écart à combler est considérable. “Nous avons un objectif intermédiaire de 400 000 enfants formés d’ici la fin de l’année 2024”, précise Virginie Jouve. “Les objectifs sont déclinés par département en fonction du nombre d’enfants de six à onze ans qui y habitent”. De quoi occuper de nombreux acteurs de la planète vélo pour les années à venir.

Le programme SRAV tire sa force d’une dynamique partenariale conséquente, présente dès la mise en œuvre du programme, et qui doit désormais se décliner aux échelles locales. Quatorze partenaires[1] ont participé à définir une méthode d’apprentissage commune et contribuent chaque jour à la mise en œuvre effective du programme. Au-delà du réseau de partenaires, chaque département dispose d’un référent. “Ils font un diagnostic du territoire et réfléchissent à la dynamique partenariale à mettre en place pour que le SRAV se déploie au mieux”, explique Virginie Jouve. 

Formation de Savoir Rouler à Vélo à Saint-Etienne ©Saint-Etienne

Une gestion de projet parfois complexe

Pour délivrer la formation SRAV à tous les enfants âgés de six à onze ans, de nombreuses conditions sont à réunir. Sur le plan des ressources humaines, il faut mobiliser et former des professionnels pour former les enfants sur les temps scolaires, périscolaires et extrascolaires. Sur le plan matériel, les formations nécessitent que les enfants disposent de vélos adaptés à leur taille et en bon état de fonctionnement. Dans certains cas, les enfants sont invités à apporter leur propre vélo, mais quid des enfants qui n’en ont pas ? Que privilégier entre l’achat d’une flotte de vélos, la location ou le prêt de vélos ? “Pourquoi ne pas créer une aide financière pour acheter des vélos non-électriques aux enfants à l’instar de l’aide à l’achat de vélos à assistance électrique ? », suggère Joan Laidebeur, directrice des services Sport et vie associative à Rumilly.

Autres enjeux pratiques, les collectivités doivent organiser l’entretien, le stockage et le transport des vélos d’un site à l’autre sur le temps de la formation. Les blocs 1 et 2 de la formation, « savoir pédaler » et « savoir circuler », ont lieu sur des sites sécurisés qui doivent être aménagés et mis à disposition des formateurs. Le bloc 2 requiert notamment du matériel spécifique comme des panneaux, des marquages au sol ou des ronds-points. Pour toutes ces questions pratiques, Vélo & Territoires et le ministère des Sports recommandent que chaque collectivité s’appuie au maximum sur les ressources humaines et matérielles déjà à sa disposition. Un conseil que n’ont pas attendu certaines collectivités.

Formation de Savoir Rouler à Vélo à Rumilly ©Rumilly

Des stratégies d’action variées

Pour déployer le SRAV, chaque territoire doit composer avec ses forces et ses faiblesses en termes de ressources humaines, de partenaires mobilisés, d’aménagements cyclables ou de matériel à disposition. A Plescop dans le Morbihan, le SRAV est délivré sur les temps périscolaire et extrascolaire, notamment les mercredis, dans une grande cour clôturée. Les vélos des enfants sont stockés dans un garage sur site le temps de la formation, sur décision des parents. “Pour la dernière sortie, nous nous sommes déplacés en car avec une remorque et nous avons fait une balade d’une journée sur les voies vertes du département situées à proximité”, témoigne Amélie Grandjean, responsable du service enfance jeunesse à Vannes agglomération.

A Rumilly en Haute-Savoie, la ville a développé un programme d’EPS spécifique en partenariat avec l’Éducation nationale, les écoles, les enseignants, la Maison du vélo et l’association de parents d’élèves. “L’activité vélo a d’abord été intégrée au programme d’EPS des CM2 avec l’intervention de deux moniteurs cyclistes français de la Maison du vélo, ce qui a permis de former les éducateurs sportifs de la ville”, explique Joan Laidebeur. La ville porte la formation à 100 % avec le financement et l’emploi de deux emplois d’éducateurs sportifs à temps plein, pour douze classes de CE1 et CE2. Elle finance aussi deux tiers de la formation d’une semaine délivrée aux classes de CM2 par les moniteurs de la Maison du vélo, d’une valeur de 5 000 euros pour une semaine. L’association des parents d’élèves prend en charge le tiers restant.

De son côté, la Réunion travaille à l’apprentissage du vélo par les enfants depuis 23 ans, avec la création dès 1998 du P’tit tour vélo USEP. Les enfants parcourent une partie du tour de l’île avec une logique de relais. Les premières éditions ont montré l’intérêt de former les enfants avant de les emmener rouler en situation réelle et de gérer le parcours de sorte à ne pas bloquer la circulation routière. L’événement regroupe quinze communes et une cinquantaine d’associations et mobilise entre 1 500 et 2 000 participants chaque année, dont 25 % d’adultes accompagnateurs, essentiellement parents d’élèves. “Le petit tour à vélo est l’occasion de valider le SRAV et de rassurer les parents”, explique Thierry Grimaud, délégué départemental USEP.

P’tit tour vélo USEP à la Réunion

A Saint-Etienne dans la Loire, le SRAV s’inscrit dans le projet pédagogique des enfants. Plus de 100 classes de CM1 et de CM2, soit environ 2 500 élèves, sont formées deux années de suite. “Le soutien des élus et un partenariat de longue date avec l’Éducation nationale sont à la clef de l’ampleur et de la qualité de notre intervention”, précise Patrick Billet, chef de projet Cyclisme à Saint-Etienne. Concrètement, les éducateurs sportifs disposent de deux sites sécurisés où les enfants se rendent le plus souvent en bus. Il aura fallu un budget de 2 000 euros seulement pour ajouter un marquage au sol et créer un rond-point sur des terrains de tennis désaffectés. Une flotte de 350 vélos est aussi mise à disposition des enfants. L’entretien est réalisé par un agent communal ou, en cas d’indisponibilité, par des associations locales.

Des outils techniques et financiers à disposition des collectivités

Un site Internet dédié au programme propose aux intervenants des outils pédagogiques avec des séances types à mettre en place. Il permet également aux collectivités de renseigner le nombre d’enfants formés, pour une meilleure comptabilité départementale et nationale. Un onglet dédié aux collectivités territoriales sera mis en ligne « prochainement ». Elles y trouveront des conseils pratiques sur la formation des formateurs, les aménagements et la gestion du matériel. Les collectivités peuvent aussi contacter le référent de leur département.

Autre dispositif à venir bientôt, le programme CEE “Génération vélo” doté d’une enveloppe de 21 millions d’euros, entend accompagner 220 communes la première année pour produire des outils pédagogiques, former les formateurs et les enfants et réaliser un contrôle technique des vélos. “Des sessions de cadrage seront animées par des coordinateurs régionaux qui réuniront la collectivité, les établissements scolaires et les partenaires locaux”, explique Claire Toubal, chargée de mission Formations à la FUB qui porte le programme.  Les collectivités désireuses de se positionner sur le dispositif dès la première année sont invitées à manifester leur intérêt à l’aide de ce formulaire.

Voilà de quoi faire renaître l’âge d’or du vélo, espéré par le directeur du Tour de France, Christian Prudhomme, “à l’image des années 50-60 où l’on voyait les gamins sortir des fermes pour aller à l’école à vélo et faire la course”. Le tout sur des voies sécurisées bien sûr. Les aménagements adaptés étant indispensables pour que les parents laissent leurs enfants circuler seuls à vélo… pour aller à l’école bien sûr !

Julie Rieg

[1] L’association Prévention Routière, la FUB (Fédération française des usagers de la bicyclette), l’association Prévention Maif, le réseau MCF (Réseau Moniteur Français), la FFVELO (Fédération française de vélo), l’UFOLEP (Union Française des Œuvres Laïques d’Education Physique), l’UNION Sport & Cycle, l’USEP (Union sportive de l’enseignement du premier degré), l’association MVV (Mon Vélo est une Vie), la Fédération française de triathlon (FFTRI), la Fédération Française de Cyclisme, la Délégation à la sécurité routière (DSR), le groupe MGEN et l’UNSS (Union Nationale du Sport Scolaire).

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