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Gérer et adapter les itinéraires cyclables aux aléas climatiques

Incendies, canicules, inondations, les itinéraires cyclables n’échappent pas à la règle et sont touchés de plus en plus fréquemment et intensément par ces aléas climatiques. « Si le vélo est désormais connu et reconnu à l’international comme un moyen vertueux de lutte contre le réchauffement climatique, le sujet de l’impact du changement climatique sur la pratique cyclable est encore très peu évoqué », observe Natalie Maroun, experte en communication de crise et directrice associée des agences element et run’concept. Des acteurs du terrain et experts de la communication de crise ont apporté leur éclairage et leurs recommandations lors de la Conférence nationale du tourisme à vélo en juin dernier. L’intention partagée ? Limiter la vulnérabilité des itinéraires cyclables aux risques climatiques.

Communiquer auprès des touristes à vélo et des socio-professionnels pendant la crise

En situation de crise, une communication réactive de l’itinéraire est cruciale. Thierry Fusalba, consultant stratégie d’influence et communication sensible à l’agence C4 et adjoint au maire de Draché (37), souligne l’importance de communiquer dès les 30 premières minutes après l’ouverture d’une cellule de crise afin d’être identifié comme une source fiable et éviter que les usagers ne se réfèrent à des sources non vérifiées. Sabine Andrieu, coordinatrice de La Vélodyssée confirme. L’itinéraire, partie française de l’EuroVelo 1 reliant Roscoff à Hendaye, a été fortement impacté par les incendies de l’été 2022 qui ont entraîné la fermeture de plusieurs tronçons de la véloroute en Gironde. La coordination de l’itinéraire a rapidement informé sur cette fermeture sur les réseaux sociaux, puis a créé une page dédiée sur le site web de La Vélodyssée. Une carte d’évolution du tracé avec les tronçons fermés, les possibilités de contournement quand elles existaient et la déviation vers d’autres itinéraires tels que La Scandibérique et le Canal des 2 mers à vélo, mais aussi des informations sur les horaires des trains figuraient en tête des informations communiquées. Le rapatriement a été facilité par le service VéloZEN mis en place par TER Nouvelle Aquitaine dès 2023. « En revanche, l’absence d’itinéraires cyclables alternatifs identifiés en amont de la crise sur La Vélodyssée et les déviations sur le terrain ont parfois conduit les touristes dans des configurations dangereuses, sur des routes départementales avec un trafic automobile important », regrette Sabine Andrieu.

Où trouver une information fiable et comment la décrypter ?

« Dans la gestion de la crise, notre principale difficulté à nous, côté coordination, était l’accès à l’information et sa compréhension », explique Sabine Andrieu. Un comité d’itinéraire doit donc se faire connaître des autorités pour être un relais d’information pour les touristes à vélo et les socio-professionnels du tourisme. « La Préfecture est la source prioritaire pour des informations vérifiées, mais il peut être nécessaire de passer par des intermédiaires tels que le Département, l’EPCI ou la mairie quand la Préfecture n’est pas disponible. L’Office national des forêts, l’Office français de la biodiversité et les services de secours sont également des contacts importants en cas d’incendie », explique Thierry Fusalba. Parfois, l’information officielle doit être clarifiée avant d’être communiquée. Par exemple, lors des incendies sur La Vélodyssée, les touristes à vélo ont mal compris les arrêtés préfectoraux en raison d’une ambiguïté sur le statut du cycliste. Les usagers du quotidien pouvaient continuer à utiliser l’itinéraire, tandis que les touristes à vélo avaient l’interdiction de circuler, car étaient rattachés à l’usage de loisirs.  « Pour éviter les tensions et les malentendus liés aux fermetures, il est crucial d’en expliquer la cause et les risques visibles et invisibles », préconise Thierry Fusalba.

S’adapter et prévenir le risque : le rôle de l’Office national des forêts (ONF)

L’ONF a créé 75 postes dédiés à la gestion des forêts en 2022. Leur mission comprend la surveillance des niveaux de risque, l’adaptation des forêts au changement climatique et la sensibilisation des citoyens aux risques d’incendie. L’ONF a mis en place des outils de veille et de communication, y compris une météo des forêts. En période de risque, des patrouilles conjointes impliquant des agents de l’ONF, de l’Office français de la biodiversité et de la police interviennent pour prévenir, informer et secourir en cas de besoin. L’ONF réfléchit aussi à l’éventuelle mise en place d’une obligation légale de débroussaillement le long des itinéraires cyclables pour réduire les risques d’incendie.

Adapter l’organisation d’un comité d’itinéraire

Pour anticiper et gérer les crises futures, La Vélodyssée a adapté son organisation en intégrant la gestion de crise et la prévention comme un élément essentiel de sa feuille de route. « Cette démarche est devenue indispensable pour garantir la qualité de l’expérience des touristes à vélo », explique Sabine Andrieu.

Ces préconisations concernent le risque incendie, mais « il est nécessaire d’élaborer des recommandations spécifiques pour d’autres risques, tels que les inondations, les canicules, les orages, l’érosion, etc. en fonction des territoires et des risques identifiés. Il s’agit aussi de se préparer à faire face à de nouveaux aléas liés au changement climatique non encore anticipés dans les territoires », insiste Natalie Maroun. Un enjeu de taille dont la stratégie nationale du tourisme à vélo, en construction, devrait tenir compte.

Les actions préconisées dans la nouvelle feuille de route de La Vélodyssée :

  1. Candidater à l’appel à projets « Développer le vélotourisme » de l’ADEME pour financer une étude sur la prévention du risque et la gestion de crise.
  2. Identifier des contacts référents et des suppléants dans les collectivités partenaires de l’itinéraire pour faciliter la coordination en période de crise.
  3. Établir des contacts et collaborer avec les opérateurs de la prévention des risques et de la gestion de crise, dont les préfectures, l’Office national des forêts, l’Office français de la biodiversité, ainsi que les services locaux de secours via l’organisation de concertation et la création d’un annuaire des contacts utiles en cas de crise.
  4. Établir un protocole de communication en cas de crise pour une diffusion rapide et efficace de l’information afin de répondre aux besoins des touristes à vélo et des socio-professionnels le long de l’itinéraire.
  5. Sensibiliser les usagers aux risques liés au changement climatique et des comportements adaptés pour garantir leur sécurité.
  6. Identifier des itinéraires alternatifs pour pallier les fermetures temporaires de la véloroute.
  7. Poursuivre le travail en partenariat avec TER Nouvelle Aquitaine et développer des partenariats avec des services adaptés aux cyclistes, comme des points d’eau publics pour favoriser l’hydratation. La Vélodyssée a par exemple développé un partenariat avec l’application géolocalisée Gourde Friendly qui recense les points d’eau potable et informe sur le niveau d’alerte sécheresse et canicule, à l’endroit où l’on se trouve.

Armelle Boquien

Pour aller plus loin :

  • Support de présentation de l’atelier de la Conférence nationale du tourisme à vélo 2023
  • Outils de sensibilisation « Tourisme à vélo : les bons réflexes face aux risques climatiques » de la Journée de la résilience : affiche et dépliant
  • Pause-vélo en compagnie de Francis Maugard de l’ONF dans Vélo & Territoires, la revue n°72 (article réservé aux adhérents)
  • Replay de la table ronde virtuelle « Tourisme à vélo, les bons réflexes face aux risques climatiques » organisée par element en collaboration avec l’agence C4 et en partenariat avec Vélo & Territoires et La Vélodyssée

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