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Tourisme à vélo : en avant les itinéraires

Extrait de Vélo & Territoires, la revue n°63

Si la crise sanitaire a accéléré la fréquentation des itinéraires cyclables inscrits au Schéma national des véloroutes, elle renforce surtout une tendance déjà à l’œuvre comme en témoignent les +19 % entre 2013 et 2019* . Les territoires se rassemblent dans des comités d’itinéraire pour développer ces véloroutes et accueillir au mieux les touristes à vélo, itinérants, sportifs et de loisirs, mais aussi les cyclistes du quotidien. Partage d’expériences.

La plateforme de France Vélo Tourisme promeut 20 000 km de grands itinéraires cyclables et grandes traversées VTT ©France Vélo Tourisme

Les grands enjeux des itinéraires

Au 1er janvier 2021, 74 % des 25 587 kilomètres d’itinéraires prévus à l’horizon 2030 par le Schéma
national des véloroutes de 2020 sont réalisés**. Les régions, départements et intercommunalités maîtres d’ouvrage ou financeurs ont leur déploiement en charge, ce qu’ils font allègrement une fois les retombées économiques potentielles en tête. Les grandes villes s’associent également de plus en plus à leur financement. “Aujourd’hui tous les territoires s’y intéressent. En moyenne, un client à vélo rapporte 68 euros par jour“, commente Véronique Brizon, directrice d’ADN Tourisme. La fédération nationale des organismes institutionnels du tourisme anime la communauté des évaluateurs de la marque Accueil Vélo (6 300 offres labellisées à ce jour) et accompagne ses adhérents, notamment les offices de tourisme, dans la délivrance d’une information de qualité aux touristes à vélo et dans la diffusion de la culture vélo aux acteurs du tourisme locaux.

Diversification de la clientèle

Le tourisme à vélo n’est plus uniquement l’affaire de retraités ou de cyclistes sportifs, mais aussi de
personnes en quête de nature et d’activités de plein air. Sur la période 2015-2019, les touristes à vélo observés sur les itinéraires étaient des itinérants (15 % des usagers), des cyclistes de loisirs (65 %), des sportifs (15 %) et des cyclistes utilitaires (5 %)***. En ce contexte de crise sanitaire, l’appétence pour le tourisme à vélo par des clientèles néophytes est forte. Pour ces touristes à vélo, le besoin en conseils pratiques est important, y compris pour des familles qui osent passer le pas. Florent Tijou, chargé de mission webmarketing chez France Vélo Tourisme, espère que ce mouvement continuera après la crise : “Le potentiel de croissance des publics locaux est énorme. La clientèle étrangère, qui représente 20 % de la clientèle globale, a tendance à stagner”. Autre fait marquant ? Depuis 2020, la plateforme France Vélo Tourisme enregistre un intérêt fort pour les itinéraires situés en-dehors des sentiers battus : les itinéraires VTT et les itinéraires d’interconnexion, qui relient des grandes véloroutes entre elles.

Partage et mutualisation

Si pour les territoires, les itinéraires cyclables sont une aubaine, ces collectivités nécessitent d’y dédier des moyens conséquents. “La région Nouvelle-Aquitaine est concernée par dix comités d’itinéraires cyclables. Participer à l’ensemble de ces projets est un vrai enjeu financier, sans compter le temps à y consacrer“, explique Agathe Daudibon, responsable du pôle itinéraires et tourisme à vélo chez Vélo & Territoires. Coordonner les itinéraires est un effort collectif que le Club des itinéraires et destinations vélo, créé en 2020 par Vélo & Territoires, entend accompagner. Enjeu ? Partager les expériences autour des infrastructures et des services, et encourager la mutualisation d’actions et de ressources humaines. En ligne de mire : faire de la France la première destination mondiale de tourisme à vélo d’ici 2030.

La Vélobuissonnière : une évasion pour les urbains

La Vélobuissonnière (V44), véloroute de 250 kilomètres inscrite au Schéma national des véloroutes, est à la croisée de trois autres itinéraires nationaux – La Véloscénie (V40), la Vallée du Loir à vélo (V47), La Vélo Francette (V43) – et de l’EuroVelo 6 – La Loire à Vélo. Elle passe – entre autres – par la muraille gallo-romaine du Mans, candidate au Patrimoine mondial, et se termine dans le Val de Loire inscrit à l’Unesco. Inaugurée en juillet de l’année dernière, La Vélobuissonnière cible notamment les urbains situés à moins de trois heures de connexion en transports publics.

La Vélobuissonnière à Fillé ©Pascal Beltrami – Sarthe Tourisme
Une aventure à échelle humaine

Nous visons plus particulièrement une clientèle domestique. Nous voulons que La Vélobuissonnière soit une destination de micro-aventure en milieu naturel pour les Français des métropoles situées à deux – trois heures de chez nous. Le bassin parisien, Tours, Nantes, Angers, Rennes, Rouen, Caen et Le Mans font partie de notre scope”, explique Grégory Pottier, chargé de mission chez Sarthe Tourisme. Pour faciliter leur venue, les collectivités proposent des lignes de bus avec rack à vélo entre Saumur et Le Mans ou des TER avec possibilité d’embarquer un vélo sur les trajets Le Mans-La Suze-sur-Sarthe et Le Mans-Alençon, toute l’année et à l’initiative de la région des Pays de la Loire. Adultes, amis ou couples tentés par une itinérance à vélo en moins d’une semaine, constituent la cible clientèle pour l’itinéraire. La Vélobuissonnière est aussi proposée aux familles pour réaliser des balades notamment sur voies vertes, par exemple entre La Flèche et Baugé-en-Anjou ou entre Le Mans et Fillé. La forte interconnexion avec d’autres itinéraires permet également de proposer des boucles interdépartementales aux touristes. Deux d’entre elles sont valorisées cette année : une de 630 kilomètres qui relie la Normandie à la Loire ; une autre de 570 kilomètres du côté de Saumur, Angers, Laval, Alençon et Le Mans.

La Vélobuissonnière à Vieil-Bauge ©Sébastien Gaudard
Une identité forte pour valoriser le territoire

Depuis l’inauguration de La Vélobuissonnière, les acteurs touristiques ont montré un regain d’intérêt pour la marque Accueil Vélo. “Avec cette nouvelle identité, la démarche partenariale mise en place, les actions de valorisation engagées et le développement du tourisme à vélo, on sent qu’il y a un véritable engouement autour de cet itinéraire”, commente Grégory Pottier. Dans l’avenir, les partenaires de La Vélobuissonnière vont renforcer cette identité commune avec le développement de Haltes Buissonnières, aires d’arrêt vélo tous les 30 kilomètres. Situées sur des points d’intérêt patrimonial ou paysager de l’itinéraire, ces aires informeront les usagers sur ces sites et inviteront à faire une pause prolongée pour les visiter.

La Vélomaritime : une ouverture sous les meilleurs auspices

S’il était déjà possible de faire du vélo sur certaines portions de l’EuroVelo 4 en France, La Vélomaritime ouvre officiellement en juin de cette année. L’itinéraire franchit 1 500 kilomètres de la Bretagne aux Hauts-de-France et longe les mers de la Manche et du Nord. Les paysages époustouflants amènent aussi leur lot de difficultés, notamment en matière d’aménagements. Durant le partenariat 2019-2023, l’enjeu principal est de “mettre La Vélomaritime en tourisme“, selon Anne Jolibois, manager de la mise en réseau des filières chez Calvados Attractivité, autrement dit “terminer les aménagements, attirer des itinérants et générer des retombées économiques“. Les 330 candidatures déposées en réponse à l’appel à ambassadeurs de La Vélomaritime début 2021 augurent un avenir radieux à cet itinéraire.

La Vélomaritime à Le Crotoy en Baie de Somme ©Emmanuel Berthier
Le littoral, attractivité paysagère et difficulté d’aménagement

L’inauguration de l’itinéraire en juin 2021 est rendue possible grâce à deux années d’intense travail avec la mise en place d’une signalétique continue et l’aménagement de sections provisoires pour permettre aux touristes à vélo de parcourir l’EuroVelo 4 de Roscoff à Dunkerque. Mission accomplie pour compléter ces aménagements sur l’ensemble de l’itinéraire cette année. La zone littorale augmente cependant les problématiques à régler. “Pour faire passer le tracé sur une route partagée, il faut moins de 1 000 véhicules par jour. En littoral, on les atteint quasiment tout le temps. On est obligé de créer plus de voies sécurisées« , commente Anne Jolibois. Sans compter les difficultés à allier zone protégée littorale et aménagements cyclables. Au final, La Vélomaritime est composée d’une majorité de sections en site partagé (67 %). Une amélioration se profile au printemps 2021 : la mise en place d’un service d’embarquement des vélos dans les cars régionaux de la ligne Caen-Le Havre pour franchir le Pont de Normandie, déconseillé aux cyclistes à ce jour.

La Vélomaritime sous l’œil des cyclistes

Pour attirer les cyclistes itinérants, La Vélomaritime conduit une campagne de communication innovante qui vise les Français résidants à proximité (50 % des touristes à vélo habitent à moins de 200 kilomètres****). Les clientèles étrangères sont aussi attendues en sortie de crise sanitaire. “On a fait un appel à candidatures à des touristes à vélo, des Mesdames et Messieurs Tout-le-monde, novices ou expérimentés. On leur a demandé de proposer un voyage avec une thématique qui leur tenait à cœur le long de l’itinéraire pour devenir ambassadeurs de La Vélomaritime“. Avec 330 projets proposés, l’appel a reçu un succès inattendu. Après une sélection difficile, cinq ambassadeurs ont été retenus : le groupe de musique Les vieux d’la Veille va donner des concerts éphémères ; un père et son fils sont passionnés de vieux gréements ; deux couples de copains épicuriens vont aller à la recherche de bonnes adresses ; un couple à la rencontre d’acteurs qui œuvrent pour le bien-être de la planète ; et le podcasteur Les nouveaux aventuriers valorisera l’artisanat et le savoir-faire local. Leurs récits de voyage, photographies et vidéos seront relayés sur les réseaux sociaux de La Vélomaritime. Un regard neuf et diversifié qui devrait en convaincre plus d’un.

La ViaRhôna : une transition vers le local

Du lac Léman à la mer Méditerranée, l’EuroVelo 17 – ViaRhôna s’étend sur 815 kilomètres. Elle traverse trois régions et un total de onze départements, avec des paysages aussi diversifiés que des vignobles, des champs de lavande et d’oliviers, des espaces sauvages, des plages et des marais, sans oublier les villes de Lyon, Avignon et Arles classées au patrimoine mondial de l’Unesco. En 2021, le comité d’itinéraire met en place une nouvelle gouvernance pour répondre aux spécificités et problématiques locales et à l’augmentation des touristes à vélo qui empruntent l’itinéraire (ils étaient 198 000 au total en 2017*****).

ViaRhôna à Lyon sur les berges du Rhône ©T. Prudhomme -Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme
Une clientèle qui augmente et se diversifie

La ViaRhôna n’a pas fait exception à la règle. Elle a elle aussi connu un essor de la pratique du vélo lors du premier déconfinement. “En 2020, la fréquentation estivale a doublé par rapport à 2019, sachant que l’itinéraire avait déjà une croissance annuelle à deux chiffres“, explique Simon Larcade, chargé de mission Véloroutes à la région Auvergne-Rhône-Alpes. Ces niveaux de fréquentation s’expliquent aussi par la croissance des clientèles locales, tendance qui existait avant la pandémie de Covid. L’étude réalisée en 2017 témoignait déjà de cette fréquentation domestique. “À l’origine, nous allions chercher des clientèles européennes avec un point de départ à Genève. Depuis 2018, nous cherchons aussi à inciter les urbains de nos territoires à faire des séjours itinérants“, précise Simon Larcade. Autre changement de taille : si des collectivités mettent en place des politiques incitatives pour que des prestataires proposent des services d’hébergement, de location ou de réparation de vélos le long de l’itinéraire, avec l’appui du plan Rhône-Saône, le modèle économique de ces acteurs semble désormais de plus en plus viable. “La clientèle des itinérants à vélo augmente et ce sont eux qui dépensent le plus“, explique Delphine Chabert, responsable Pôle outdoor et bien-être thermal chez Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme. Sur la période 2015-2019, les itinérants représentaient la moitié de la clientèle touristique de l’itinéraire******.

Le Rhône et ViaRhôna dans le nord de l’Ardèche ©Christian Martelet – Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme
Une gouvernance en tronçons

Pour la période 2021-2024, la ViaRhôna intègre l’ensemble des intercommunalités à sa gouvernance souple, en sus des régions et des départements. Elle encourage par ailleurs deux niveaux de partenariat, prenant exemple sur la démarche déjà mise en œuvre en 2018 sur la partie Léman-Lyon. Concrètement, trois comités de tronçons de la ViaRhôna – du Léman à Lyon, de Lyon à Avignon et d’Avignon à la mer – sont créés en plus du comité d’itinéraire global porté par les régions, avec deux objectifs principaux à la clé : mieux animer les réseaux d’acteurs du tourisme et du vélo sur ces tronçons grâce – entre autres – aux intercommunalités et offices de tourisme ; et répondre aux enjeux propres à chaque tronçon. À terme, les initiatives concluantes à l’échelle d’un tronçon pourront être diffusées sur l’ensemble de l’itinéraire.

Julie Rieg


*Plateforme nationale des fréquentations, Vélo & Territoires

**Observatoire national des véloroutes et voies vertes, Vélo & Territoires

*** Typologie de pratique des touristes sur les six dernières enquêtes de véloroutes et voies vertes en France réalisées entre 2015 et 2019, étude Impact économique et potentiel
de développement des usages du vélo en France, avril 2020

**** Étude Impact économique et potentiel de développement des usages du vélo en France, avril 2020

***** Étude de fréquentation de l’EuroVelo 17 réalisée en 2017
****** Typologie de pratique des touristes sur les six dernières enquêtes de véloroutes et voies vertes en France réalisées entre 2015 et 2019, étude Impact économique et potentiel de développement des usages du vélo en France, avril 2020

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