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La location de vélo «one-way», sujet à la marge ou en devenir ?

Plus qu’une tendance, l’itinérance à vélo est aujourd’hui une pratique touristique à part entière. Les territoires, toutes échelles confondues, se sont emparés des multiples enjeux liés à la pratique : qualifier les infrastructures, développer les services, marketer l’offre. De nombreux leviers doivent cependant encore être activés pour faciliter davantage l’itinérance à vélo. Louer un vélo à un point A et le restituer à un point B en « one-way » en fait partie. Cette location apporte la souplesse. Aujourd’hui cette offre est variée, dense et complexe à comprendre. Vélo & Territoires a donc réalisé un décryptage, à partir de retours d’expérience et d’entretiens conduits pendant plusieurs mois et qui ont été partagés au sein d’un groupe de travail composé des itinéraires et des destinations cyclables membres de l’association.

 La location vélo « one-way », ses enjeux et ses acteurs

L’élément indispensable pour débuter un voyage à vélo en itinérance, c’est bien évidemment de disposer d’un compagnon de route à deux roues. Deux solutions pour y parvenir : disposer de son propre vélo ou bien opter pour la location. Dans ce second cas, l’idéal est de récupérer le vélo à son point de départ et de le restituer à son arrivée. Les acteurs mobilisés pour structurer cette offre de location « one-way » sont aujourd’hui identifiés en deux grandes familles. D’une part, les institutionnels, plus particulièrement les comités d’itinéraires et destinations cyclables, qui œuvrent à la professionnalisation et la valorisation des socio-professionnels. D’autre part les acteurs privés issus de différentes branches professionnelles tels que les loueurs de vélo, les prestataires de services, les agences de voyages et les tours opérateurs, qui proposent des séjours tout compris.
Pour ces deux typologies d’acteurs, l’objectif est le même : proposer et valoriser un service de qualité et ainsi satisfaire la demande du touriste à vélo.

Mais les acteurs interrogés pointent un certain nombre de freins à lever avant d’atteindre une qualité de service suffisante : une logistique à optimiser, une flotte de vélos à adapter à l’itinérance, des équipements associés et des services annexes comme le transport de bagages ou la réparation de vélo à proposer et une communication efficace à mettre en place. En analysant l’ensemble de ces variables, fort est de constater que de multiples leviers sont disponibles mais c’est en facilitant leur synergie entre intervenants que l’expérience du voyageur pourra être pleinement réussie.

Rendre visible l’offre : un enjeu majeur

« « One-way » ? Je ne connaissais pas ce terme » précise Julie, adhérente de la Maison du vélo de Lyon. « Je ne savais pas qu’il existait la possibilité de prendre et de rendre un vélo à deux endroits différents » ajoute Moncef, adhérent Etabli’cyclette atelier associatif d’autoréparation de vélo. Deux témoignages d’itinérants à vélo qui ignorent l’existence même du service, révèle bien l’ampleur du travail à mener sur la communication lorsqu’on parle de location « one-way ». Le service est pourtant très apprécié par les itinérants à vélo… quand ils en ont connaissance ! Expliciter le terme et le rendre visible, certains itinéraires y sont parvenus et figurent ainsi en tête des résultats sur les moteurs de recherche quand on utilise les mots clés « voyage à vélo one-way », à l’image de La Vélodyssée. Il n’est donc pas dénué de sens d’optimiser son référencement en utilisant des mots clés pertinents tels que « voyage à vélo », « itinérance », « one-way », etc. Mais cela requière des compétences digitales en marketing et communication, souvent évidentes pour les institutionnels mais dont les loueurs de vélo ne disposent pas toujours. Aussi pour accompagner les professionnels et rendre leur communication plus efficace, les itinéraires et les destinations cyclables partagent leurs connaissances et organisent des webinaires de formation. Cela a en outre l’avantage de créer du lien entre les acteurs publics et les acteurs privés, un autre levier pour plus de synergie.

Créer du lien, un levier supplémentaire

Pour développer l’offre de location « one-way » et faciliter la logistique que le service impose, les itinéraires et les destinations cyclables souhaitent une collaboration étroite entre les loueurs. Mais ces derniers sont confrontés à des contraintes propres à leur activité : la concurrence, la législation voire même le problème de confiance, rendent difficiles les partenariats et incitent à privilégier le travail en solo. Pour favoriser les échanges, l’organisation de rencontres, à plus ou moins grande échelle, sera un premier élément de réponse. C’est par exemple dans le cadre d’un événement organisé par La Vélomaritime que Les Trouvillaises et Loc’vélo se sont rencontrés et ont créé un partenariat. Depuis, les deux loueurs travaillent main dans la main et veillent à faciliter le quotidien de chacun. Pour mieux faire connaitre l’offre, les partenariats doivent se multiplier sans se limiter à certains acteurs ou à certaines échelles géographiques. La collaboration entre l’office du tourisme de la Baie de Morlaix et l’agence Abicyclette Voyages est une belle illustration : l’office réceptionne les demandes des voyageurs à vélo qu’il transfère à Abicyclette voyages, qui voit ainsi sa demande croitre de façon significative. Et quand des initiatives plus larges sont lancées, à l’image de ce que propose le prestataire de services OuiBike, la portée est augmentée. En tant que réseau national de loueurs de vélo, Ouibike recense les différentes antennes de location de vélo sur sa plateforme nationale en ligne et développe un module d’aide à la création de partenariats. Antoine Renault de chez Ouibike n’est pas peu fier du partenariat mis en place à Sourdeval (50) entre un loueur de vélo et un office du tourisme qui répond à un double enjeu : permettre la location de vélo « one-way » à proximité de grands itinéraires comme La Vélomaritime, La Véloscénie et faire revivre le bureau d’informations touristiques de Sourdeval jusqu’alors fermé. Un partenariat public/privé gagnant-gagnant.

Ne pas négliger les équipements et les services annexes

Pour satisfaire pleinement leurs clients, les professionnels concernés par la location « one-way » visent la qualité. C’est en particulier vrai quand ils choisissent les vélos qui seront mis à disposition des voyageurs à vélo. Jérôme Gainche, fondateur de Véloc’Ouest fait part de son attachement à proposer du matériel robuste à ses clients : « chez Véloc’Ouest on investit dans du matériel de qualité, certes c’est un gros investissement, mais nous avons moins d’intervention de dépannage et les clients reviennent aussi pour cette qualité ». Les agences de voyages et tours opérateurs ont également cette exigence, que ce soit pour le matériel, ou vis-à-vis des partenaires qui accueilleront leur clientèle. Ils rencontrent cependant des difficultés dans la production de leur séjour quand les hébergeurs ne proposent pas le séjour à la nuitée. Pour y pallier, il est essentiel de les sensibiliser aux bénéfices de l’itinérance à vélo. L’ouvrage « Développer le tourisme à vélo dans les territoires » apporte des éclairages sur la pratique et souligne l’intérêt, notamment économique, de se tourner vers l’accueil de cette clientèle en plein essor. Parmi les services appréciés par les voyageurs itinérants à vélo, que certains professionnels négligent parfois : le stationnement sécurisé, la mise à disposition de pompes à vélo, un petit-déjeuner adapté aux sportifs, feront la différence.

Optimiser la logistique pour rendre le système économique viable

Lorsqu’un loueur propose le service de location « one-way », l’une de ses plus fortes contraintes concerne le rapatriement de vélos. Disposer de lieux de prise en charge et de dépose des vélos, pour le stockage sur un laps de temps donné optimiserait les rapatriements, contribuerait à baisser les coûts de la location vélo « one-way ». Face à cette difficulté, certains loueurs font le choix de la « débrouille ». Ainsi Cyclétic basé à Lyon collabore avec un loueur situé à Avignon pour le stockage de ses vélos. Localisé sur la partie nord de la ViaRhôna, il recense en effet plus de prises en charge que de restitutions de vélos et a dû trouver une solution pour éviter un trop grand nombre d’aller-retours dans le sud. Il a bien imaginé des alternatives. Pourquoi pas l’intervention de la Région, par exemple, en tant que sponsor pour la mise en place de navettes de rapatriement ? Cela lui permettrait d’optimiser sa logistique, de faire baisser ses coûts et ainsi de proposer une offre plus abordable à ses clients. Mais il ne se sent pas la force de porter ce message seul. Appel aux itinéraires ou aux destinations qui pourraient l’aider… L’implantation de lieux de stationnement/stockage sécurisés, notamment aux abords des offices du tourisme ou des gares, est un levier à forte valeur ajoutée pour les professionnels du secteur. Fort heureusement, des initiatives se sont mises en place et peuvent être source d’inspiration : l’Office de Tourisme de Rouen offre ainsi à Loc’Vélo la possibilité de stocker ses vélos, afin d’optimiser sa logistique.

Quelles que soient les alternatives proposées face à cette problématique, elles doivent surtout permettre de réduire les coûts de ce service pour éviter que, par exemple, certains touristes optent pour des alternatives surprenantes voire ubuesques. « Certains touristes achètent un vélo sur le lieu du départ et l’abandonnent à la fin de leur trajet car cela leur revient moins cher » explique Antoine Renault de chez Ouibike.

Source : Club des itinéraires et destinations vélo – groupe de travail « one-way » – Le « one-way » : une multitude d’offres

Une multitude d’actions au service de l’offre de location vélo « one-way »

Le constat est clair, la location de vélo « one-way » ne peut pas être le fait d’une offre unique et uniforme. Elle mobilise une multitude de solutions, autour d’une multitude d’acteurs, qui maillent et irriguent le territoire et qui dispose d’un fort potentiel de croissance.
Aujourd’hui, cette offre est une réponse partielle à différents enjeux du tourisme à vélo et notamment aux difficultés rencontrées par les voyageurs à vélo en matière d’intermodalité (train/car + vélo).

Pour que cette réponse soit à l’avenir complète, connue, fluide et précise, les acteurs devront s’organiser collectivement pour la structurer, la démocratiser et la faire vivre.
La location vélo « one-way » constitue l’un des nombreux leviers pour faire de La France la première destination du tourisme à vélo à condition que les initiatives menées autour de ce service soient poursuivies et soutenues.

Adeline Janneteau

Schéma & Itinéraires